Cluster One ne doit pas masquer la forêt

Après bien des vicissitudes, le tant attendu Cluster One est donc arrivé.
Le nouveau site Web et son interface utilisateur ont d’emblée séduit la majorité
de la rédaction : du beau travail de la part des équipes qui l’ont conçu, qui a
rendu « responsive » et mieux présenté un contenu rédactionnel qui pâtissait
auparavant d’un site vieillissant ; un back office fonctionnel, simple d’accès qui
rend la mise en ligne bien plus aisée.
Les bugs du lancement, inévitables « pour un projet aussi complexe », aime à
rappeler la direction, ont à peine entamé l’appétit des équipes qui se sont
rapidement approprié l’outil pour le nourrir de contenus dans des proportions
jamais atteintes. Comme quoi la bonne volonté de chacun, le désir d’exercer sa
profession au plus près des attentes des lecteurs sont intacts.
Enfin, presque. Passons sur les bugs persistants, et notamment le fonctionnement
aléatoire du système de sauvegarde, qui finissent par user les patiences mais
laissent heureusement l’espoir que cela s’améliore. Et insistons sur le fait que, au
rythme de travail déjà oppressant pour beaucoup avant Cluster One, se sont
ajoutées les nouvelles exigences d’un site qui se veut « Web first »… sans en avoir
les moyens. Alors, sur le mode des 5W du métier, le SNJ vous propose cinq axes
à ne pas perdre de vue, « Web first » ou pas…

1. Cluster One n’est qu’un nouvel outil, qui ne nous exonère pas des
fondamentaux de la profession : collecter, vérifier, recouper, sourcer
et mettre en perspective l’information. Les journalistes doivent donc disposer du
temps et des moyens nécessaires, quel que soit le support où leurs articles seront
publiés.

2. Tout contenu rédactionnel doit faire l’objet d’une relecture attentive, par
la hiérarchie, par un SR, par un CDM ou par un voisin de bureau.
Selon nous, il est impératif qu’une organisation soit mise en place pour que cette
double lecture soit assurée et organisée, notamment en terme de temps.

3. On ne doit pas déshabiller le journal pour habiller le site : une réflexion
et des choix de complémentarité/différenciation entre le Web et le print
sont indispensables. Ce sont les lecteurs du papier qui font vivre l’entreprise. Ne
les négligeons pas. Là encore, nous demandons qu’une organisation rationnelle
du « qui fait quoi pour quel support » soit mise en place, avec les effectifs
nécessaires.

4. La charge de travail supplémentaire que représente l’ambition de faire
du « Web first » sans lâcher le papier doit être prise en compte et compensée.
Le non-remplacement des prochains départs en retraite de journalistes serait
pour le moins incompréhensible. Des embauches seraient en revanche un signe
positif pour une rédaction qui ne ménage pas ses efforts.

5. L’orientation numérique de la rédaction a généré de la polyvalence,
multiplié les compétences et crevé les anciennes cloisons des métiers et des
fonctions. Il est plus qu’urgent qu’une grille des fonctions et des indices soit
renégociée. Et que les salaires de ceux qui alimentent le site et les différentes
éditions papier soient augmentés de manière significative.